R contemporains
- Stan Dell
- 3 juin 2022
- 2 min de lecture
« La porte ! ».
Je suis Roger Ridéser, cerbère au forum d’R contemporains où sont révélées des réalisations révolutionnaires dont la référence, rondement rapportée rappelle la résonnance rauque et rocailleuse du R. Mon rôle ? Être sévère avec les rôdeurs qui errent sans refermer la porte. Cela me réduit à un repérage régulier de roublardises. En réalité, je ne râle en rien.

Le forum d’R contemporains, entre Rennes et Redon, est un régal récréatif érigé récemment par un riche roturier réunionnais qui se régalait à rouler les R en racontant des récits romanesques. Le régisseur m’a recruté en raison de ma réputation en rapport avec mes racines rhénanes des rives du Rhin.
Au forum, je suis responsable de l’aire de la porte à la renommée retentissante. C’est un rectangle de trois rectitudes réhaussés d’un mur et la dernière parée d’une ravissante porte en résine. Autour de cette porte, rien de rien. Le régisseur rêvait de révéler aux rompus d’art en R qu’une porte réussirait à rayonner sans mur.
En régisseur expert, il réitéra ce raisonnement pour l’aire du mur, réouverte récemment. C’est une aire ronde d’un rayon représentatif. Lors de sa réalisation, on réclama de récupérer la porte en résine pour refermer de manière respectable ce rempart circulaire. Le régisseur refusa, révélant aux rompus d’art en R qu’un mur réussirait à rayonner sans porte.
La porte ne serait rien sans le mur, le mur rien sans la porte. Rigolade ! La porte n’a que faire du mur pour se rouvrir ou se refermer. Le mur rit de la porte pour retrancher les regards et retenir les ragots. Réunis, ils apportent matière à réflexion. Ces errements réglés, revenons à mes responsabilités.
L’aire de la porte est mon refuge. Elle recèle des ressources d’une rare richesse, des restes de rebonds sur ressorts rouillés, des regrets de républicains résistants, des rafiots rafistolés restés en rades ou une rigole à rictus railleurs. En récompense de ma régularité, le régisseur me réserve l’aire de la fenêtre, récemment réalisée. Un rôle reposant, reconnait-il, n’y resteront que des rôdeurs résignés. J’ai des regards sur l’aire de la lucarne mais Robert Criter, un cerbère originaire de Reims s’y refuse.
Mon imaginaire me transporte régulièrement à des années-lumière de notre ère, dans un rêve d’une aire remplie de portes roulantes, rotatives, rabattantes, radioactivées, romaines, rabotées, cochères. Sur ces courants d’R portés, de ravissants ramiers roucoulent sous le regard rieur du régisseur transporté. Après ce rêve récurrent, je reviens sur terre, réalisant l’air de rien, que l’art se range religieusement dans les recoins de l’imaginaire.
Je vénère l’air si cher des R qui errent en mystère, sans repères ni manières et libèrent dans la sphère des cerbères sévères des rêveries éphémères qui prolifèrent. Je réalise que je déblatère. Alors je me ressaisis, retrouvant mes airs rangés et me retire en reprenant la porte.
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